alucard Mar 17 Fév - 14:54
Bonjour,
Tout d'abord un grand merci à Remi pour son travail de "traduction"/ adaptation de cette fameuse équation. De plus j'ajoute que la pédagogie introduite pour qu'on puisse suivre facilement l'équation est très sympathique. Le plus intéressant, ce qui amène selon moi les discutions les plus productives, c'est d'avoir proposé plusieurs "scénario" en fin de démonstration, avec la projection de base, la proposition de Manicore et celle de "Demographie responsable". Je reviendrai sur ce point tout en fin de message.
Remerciement à part, je voudrai néanmoins formuler quelques critiques pas bien méchantes.
- On voit bien que Manicore a fait polytechnique : pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? En fait, cette équation permet de mettre des symboles et des chiffres à l'idée suivante :
"plus en est sur terre, plus on consomme ET moins nos techniques sont efficaces, alors plus on va produire de CO2".
Chaque terme de cette phrase ci-dessus est "traduite" mathématiquement par une fraction.
Problème : ces chiffres ne sont pas des chiffres exactes, tout simplement parce qu'il n'y a pas de mesure possible, mais tout au plus une évaluation, qui se fait plus ou moins au doigt mouillé.
Je m'explique : "l'intensité énergétique de l'économie", par exemple, ne peut être évaluée que si l'on a préalablement des chiffres officiels concernant le PIB, et bien entendue de même pour les chiffres officiels de l'énergie consommée correspondante.
Or la réalité est plus complexe. D'une part beaucoup d'étapes échappent à toute évaluation économique (marché au noir, filière non contrôlée etc.) et de même sur le plan énergétique : on ne peut qu'évaluer ce qu'a consommé une population pour vivre (il n'y a pas que des énergies commerciales).
Mais, il est vrai que ces remarques peuvent être formulées à l'encontre de beaucoup de formule du même genre. Cependant il y a un autre problème qui se situe au niveau des projections sur la croissance économique.
Cette dernière critique, plus problématique cette fois, consiste à dire que quel que soit le scénario privilégié, nous ne pouvons pas raisonnablement retenir un taux unique (par ex 2%/an) et le décréter comme automatiquement renouvelable et constant chaque année et ce, pendant plus de 40 ans. Il est évident que c'est la variable qui est la plus susceptible de subir les plus importants écarts, en négatifs ou en positif, en l'espace de seulement 1 ou 2 années (contrairement aux autres variables qui possèdent des inerties très importantes).
Ce fait est illustré, en négatif, par la récente chute des bourses mondiales : quelques semaines ont suffis à changer tout le paysage économique et toutes les espérances concernant cet indicateur.
Actuellement, les croissances les plus fortes, c'est à dire celles des pays en développement (Inde Brésil et Chine) restent positives et assez fortes, mais ont tout de même chuté de environ 15% / an à 7 ou 8 % par an. Cela reste tout de même très fort. Mais c'est déjà une diminution de moitié en l'espace de quelques mois.
Alors que la plupart des pays les plus riches ont vu leur croissance chuter fortement depuis la crise de fin 2008, il est possible que leur croissance remonte la pente d'ici un an ou deux. En tout cas c'est évidemment ce que les politiques cherchent désespérément à faire.
Tout ça pour dire que l'indicateur/ projection sur la croissance est à prendre avec des pincettes, car il pourrait aussi bien et raisonnablement donner des chiffres très divergents. voici quelques exemples (voir la formule utilisée à la fin):
une croissance répétée de 3% (au lieu de 2% dans le développement de Rémi) produirait un facteur = 3,36 (à comparer avec le chiffre de 2,25)
une croissance à 0,5% / an --> facteur 1,23
Et maintenant si on pense avec une décroissance on peut obtenir :
-0,5% / an --> facteur 0,8
-5% / an (ce qui est très improbable, car très violent) --> facteur 0,12 (soit 20 fois moins qu'avec une croissance de +2% / an)
Alors qu'il est peu probable que la population totale mondiale varie dans des proportions aussi grandes, je voulais attirer votre attention sur le fait qu'un toute petite modification de l'indice 'croissance' change totalement les résultats de l'équation de KAYA, et donc évidemment les conclusions que l'ont peut en tirer. Entre le scénario à croissance annuelle = 3% et celui à décroissance -0,5%, qui sont deux scénarios tout à fait crédibles, la différence est un facteur supérieur à 4, soit une marge d'erreur "raisonnable" d'environ 400% sur notre propos. C'est un peu large pour être solide.
Voila qui fait tempérer la pertinence de la mathématisation simple de facteurs extrêmement compliqués.
La plasticité de l'indicateur 'croissance' est trop grande pour donner des résultats exploitables sur 40 ans.
Que faire ? Ne pas tenir compte des taux économiques annuels et parler de consommation globale ?
Malgré tout j'ai beaucoup apprécié l'idée de "non croissance économique". Même si cela n'est pas tout à fait notre propos, nous pourrions accepter comme une norme idéale ce taux neutre ??
A bientôt et merci encore à Rémi pour son travail qui provoque un débat constructif.
Formule à taux fixe répétée sur 41 années ; soit (1 + taux)^41
ex : 3% --> (1+0,03)^41 = 3,36
ex -0,5% --> (1-0,005)^41 = 0,8